Ajout grégorien.

Publié le par Jean von Roesgen


 La théorie de Dom Moquereau est un excellent travail d'inculturation du chant grégorien dans le langage musical classique (postromantique?) de son époque, de sa culture et de l'éducation musicale classique à laquelle il a eu droit. Merveilleuse trouvaille (mensuraliste en tout fin de compte, mais non pas mensuraliste sur les neumes, mais sur le déroulement mélodique en soi, sur le tracé mélodique en soi) que d'organiser le déroulement rythmique de ce chant en rythmes binaires et ternaires qui se succèdent en libres combinaisons.
 Alors que le rythme de la parole de Dieu veut être libre et organique, et non pas soumis au carcan de quelque danse mécanique que ce soit.
 La théorie de Dom Moquereau (aussi belle, ingénieuse et respectable qu'elle soit), qui n'a d'ailleurs pratiquement jamais été vraiment appliquée à Solesmes, où le rythme verbal primait toujours pour la portée due à la parole, a contribué à discréditer et conduire le chant grégorien à la crise qu'on lui connaîtra. (Je sais que là-dessus je ne suis pas d'accord avec beaucoup de nostalgiques du chant grégorien d'avant le concile.)
 Il n'y a pas de doute, du temps de la bataille des éditions (médicéenne ou solesmes? pustet ou desclée?) la manière de faire de l'école de Solesme était la meilleure, et on lui doit un profond respect. Mais il ne faut pas s'arrêter là, de peur de re-dégénérer le chant grégorien.
 On ne s'est pas arrêté là, les recherches paléographiques vont bien leur cours toujours.
 Heureusement, le chant grégorien est vivant, et non pas cantonné dans l(a liturgie d)es années cinquante. Solesmes même ne s'est pas arrêté là d'ailleurs. On n'arrêtera pas le chant grégorien, même si depuis le concile, il faut sagement distinguer des interprétations de concert des interprétations en église, qui doivent tenir plus compte de la sensibilité et la tradition des interprétations dans l'église, dont la fameuse méthode devenue obsolète, mais qui reste dans le subconscient collectif (grâce aux enregistrements aussi malheureusement des années cinquante...) et sont moins à l'affût des recherches neumatiques. Au nom de la Tradition, la compréhension de la parole prime, et en fonction de cette compréhension, il faut éviter une interprétation trop plane et régulière qui écrase les mots mélismatisés, surtout à leurs fins (les fameuses cadences fa-sol-la-sol-fa sol sol-fa par exemple) et les rends incompréhensibles. Et éviter une de ses interprétations vrai exploit hiatiquorépercutoguttuglottorales qui ne sert pas non plus le texte, mais tout juste à montrer la brillance et virtuosité de l'interprète et soit disant l'originalité exotique et archaïque de cette musique (p)neumatique.
 

Publié dans chant grégorien

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